Zabou the terrible

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Mot-clé - Born to be a prof

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jeudi, mars 2 2017

Carêmencer #1

Une petite série de Carême ? Pourquoi pas... Sans savoir à l'avance si je m'y tiendrai ou pas. 

Une idée en l'air : peut-être avec quelques mots en C en lien avec le Carême et un titre "Carêmencer" qui ferait rimer Carême et ensemencer. Parce qu'il y a quelque chose de cela dans cette marche de 40 jours : comme des germes de liberté à ancrer plus fermement et plus fertilement en notre vie !  

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Le carême, c'est un tantinet comme le... 

... Correcteur (automatique) de mon iPhone, ou presque ! 

 

Pourquoi ? Je vous explique : tout à l'heure, j'écrivais un bête texto sur une histoire sordide de mon collège. Pour marquer mon embêtement, je l'agrémente d'un :-s smiley montrant mon désarroi face à l'affaire... et voilà que le correcteur automatique de mon iPhone le corrige en :-D me faisant par là-même sourire ! 

Le carême, c'est un peu comme cela : la conversion de nos grises mines en sourires lumineux... Sauf, qu'à la différence de l'iPhone, cela ne fait pas abstraction de notre liberté en corrigeant automatiquement : il faut y engager notre volonté, notre désir et le Seigneur pour que soient convertis nos moments de tristes sires en visages rayonnants de Lui ! 

 :-) 

 

vendredi, février 3 2017

Ma première journée de la vie consacrée… de la loose ? 

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Aujourd’hui, 2 février, fête de la Présentation de Jésus au Temple, c’était la fête de la vie consacrée, ainsi que l’a instituée le pape Jean-Paul II il y a vingt ans. 

 

C’était la première fois que c’était vraiment « ma » fête et j’aurais bien marqué cela d’une manière ou d’une autre… 

En réalité ? Ce fut une grosse journée de travail où je n’ai même pas eu la messe - pour la seule fois de la semaine : pile le mauvais jour ! -, ni la possibilité de prier un office avec quelqu’un ou plusieurs autre(s). Les Laudes seule au réveil, les Vêpres seule tard, les Complies dans quelques instants, seule… La loose quoi pour un jour de fête ! 

 

Et puis, j’admets que, depuis quelques années, j’invitais les rares amis au courant de mon chemin à festoyer autour de quelques crêpes (d’ailleurs, lors de ma pendaison de crémaillère, on m’avait offert un appareil à crêpes : coïncidence ?)… parce que, pour tout vous dire, les amis et les crêpes, j’aime bien ça ! Là, ce soir, c’était remise de bulletins donc une fin bien trop tardive pour préparer de la pâte à crêpes et inviter des amis… la loose je vous dis ! 

 

Il faut dire que je faisais cours, dans cet état d’excitation si particulier qui précède les vacances. 

Quand la dite prof est consacrée, elle admet aimer s’échapper parfois, le temps d’une messe comme dérobée au quotidien pour savourer tout le reste. Mais là, c’était la journée paresseuse d’une prof comme l’opinion publique l’imagine si souvent : 8h30-20h30. 

Il faut dire que, ce soit, c’était remise de bulletins… jusqu’à pas d’heure. 

 

Et la remise de bulletins, ce n’est pas vraiment de tout repos. 

 

Seigneur, Tu sais, je les aime bien mes élèves mais leurs parents, ce n’est pas toujours si simple. 

Certains, la plupart même, ça va mais Tu sais bien qu’il y a aussi ces gros relous… Ces gros relous-là qui vont me prendre plein de temps par rapport à celui que je leur ai alloué et me mettre en retard, ceux-là qui vont m’accabler sous un moulin à paroles que mon tempérament sensible peine à supporter sans me sentir très mal à l’aise, ceux-là qui critiqueront tout et tout le monde et n’aideront pas leur enfant à grandir en regardant la réalité en face. 

Enfin, non, Tu ne sais pas : ce sont des gros relous mais pour moi, selon moi… pas selon Toi. 

Car Toi, Tu ne les vois pas ainsi : Toi, Tu es même le gars, enfin, Dieu capable de faire l’éloge de l’ami importun ! 

Toi, Tu aimes et Tu sais aimer : je suis mauvaise élève mais j’aime me mettre à Ton école.  

Et puis, il faut dire qu’il y aura surtout ceux-là que je sais que Tu aimes avec cette tendresse si particulière : ceux-là qui sont pauvres… pour de vrai. 

Ceux-là qui me briseront un peu plus le coeur comme à chaque fois, 

Ceux-là même qui me font prier en les écoutant. 

 

Tu sais, je ne sors jamais tout à fait indemne de ces remises de bulletins… 

 

Alors, là, pour la fête de la vie consacrée ? 

Ce n’est pas la fête que j’aurais espérée pour cette première fois où je la vis en étant tout à Toi. Je l’aurais aimée super priante, super amicale, super festive. Mais je crois qu’elle était réussie cette première fête de la vie consacrée d’une jeune consacrée : je crois que j’étais là où Tu me demandais d’être, Seigneur ; 

parce que, Toi, quand Tu rencontres les autres, c’est toujours la fête ; 

Et surtout, je suis certaine que j’y étais avec Toi et que Tu y étais avec moi. 

lundi, janvier 30 2017

Comme une pauvre tache...

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Ce moment de pause qu'est la messe du soir, après une journée bien chargée. 
Communion, ce moment où je regarde mes mains : ouille, pleines d'encre. 
C'est sûr que recevoir le Seigneur dans ces conditions, c'est pas top... Et pourtant...
Pourtant, cette encre, c'est celle de mon stylo qui fuyait tout au long de cette journée où j'ai fait passer des oraux ; 
Pourtant, cette encre, c'était juste le signe humble de mon travail, rien d'autre. 
Alors présenter ce travail au Seigneur pour Le recevoir ? 
Ce n'était pas "sale" cette tache de ma tâche, c'était comme un signe très concret qu'Il vient nous rejoindre dans ce que nous faisons, dans ce que nous sommes : 
Pour qu'Il soit, au-delà des marques disgracieuses, la seule véritable encre de mon existence, afin qu'elle s'écrive selon Lui. 

dimanche, janvier 8 2017

Laisser se faire la lumière pour découvrir, pour aimer

 

Celui-là est mon élève depuis l’année dernière : fieffé garnement, à la lisière du conseil de discipline bien souvent, trop souvent…

Et, à côté de cela, des histoires familiales bien trop lourdes à porter pour un tout jeune collégien, qui serrent le cœur quand on les apprend.

Puis, en même temps, de vrais efforts et progrès depuis la rentrée, appréciables et appréciés.

 

Pourtant, il n’en demeure pas moins que, cet élève-là, il m’agace bien souvent tant il sait ce qu’il faut faire pour titiller… A moins qu’il ne le cherche même pas, c’est possible aussi.

Avec lui, j’apprends bien plus qu’avec d’autres la patience tant j’ai parfois envie de lui crier dans les oreilles !

 

Cet élève, comment va-t-il grandir ? Réussira-t-on à l’aider ?

Ce matin, à la messe, j’ai pensé à lui : quelle est l’étoile à laquelle il accrochera sa vie ?

Alors, j’ai prié pour lui.

 

Ca m’a fait penser à une scène récente.

Il faut préciser que, souvent, on me demande ce qu’il y a de changé dans ma vie maintenant que je suis consacrée : comme le lendemain, j’aurais du mal à répondre autre chose que « tout et rien ».

Mais au quotidien, dans mon travail de prof, il y a une chose qui change, foncièrement, et j’en ai pris conscience grâce à lui :

Alors que je reprenais cet élève pour la 3ème ou 4ème fois du cours, qu’il n’avait pas écouté les consignes que je venais de donner, que je commençais à sentir monter en moi un début d’énervement et que je priais quelque peu en ces termes : « Esprit Saint, viens à mon aide pour que ce ne soit pas la moutarde qui commence à me monter au nez qui réponde », j’ai été prise soudain d’une grande vague de compassion :

« Si tu pouvais savoir à quel point Dieu t’aime, toi aussi… » 

Intérieurement, je me suis mise à sourire et je crois qu’il l’a perçu :

« Et ma vie, elle est donnée pour toi, aussi » ai-je continué à penser, « peut-être même encore plus spécialement »

Je l’ai pensé, je l’ai prié : ça a redonné, à tout, la juste tonalité.

Et si la sequela Christi – la suite du Christ – à laquelle je me suis engagée, elle passait spécialement par là pour l’enseignante que je suis ? 

Don caché de soi aux élèves ; 

Apprentissage patient de l’amour, dans le cœur du Christ.

 

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Lumière, Kim En Joong

 

lundi, novembre 7 2016

Regarder pousser...

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Grandis. 

C'est le mot qui m'est venu en tête en les voyant vendredi soir. 

Je l'avoue, je suis venue en traînant un peu les pieds : c'était quoi encore cette invention de cérémonie de remise des diplômes du brevet alors qu'on a une cérémonie en interne fin juin/début juillet pour tous les niveaux, récompensant nos élèves les plus méritants. 

Et puis, je les ai vus, mes pieds se sont allégés et j'ai changé d'avis. 

Les revoir ces anciens 3èmes, quelle joie ! Les revoir grandis, changés et pourtant encore tellement "eux", heureux, joyeux de leurs découvertes en lycée. Certains trouvant cela plus facile, d'autres plus difficile. 

Et tous, anciens bons élèves ou élèves plus difficiles, de nous raconter leurs premières semaines dans un autre monde comme autant de pépiements joyeux... 

Ce n'est pas tous les jours qu'on a la joie de voir des petites pousses de graines semées, parfois par météo capricieuse :
à les voir ainsi, ils ouvrent le coeur à la beauté du professorat et encore plus profondément à l'action de grâce ;
à les voir ainsi, on a envie de continuer à les porter de loin par la prière, pour qu'ils réussissent la vie sous la forme qu'ils auront choisie. 

 

vendredi, septembre 9 2016

Ce qu'il y a de Croissance

Pour la session d'été de l'association CdEP (Chrétiens dans l'Enseignement public : http://www.cdep-asso.org), j'ai été invitée à écrire un témoignage sur l'estime de soi. Il m'a semblé couler de source que ce témoignage devait être la suite d'un précédent billet, intitulé "Ce qu'il y a d'Espérance" car ce que je narre ici en a été la toute simple mais aussi la très belle suite. 

 

Car il y eut une suite, inattendue pour cette élève qui, quelques mois plus tôt, s'était effondrée en larmes à l'issue d'une heure de vie de classe, pleine de doutes... 

 
L'année se déroula, plutôt bien pour cette élève puisqu'elle obtint un de nos diplômes d'élève méritante à la fin de l'année ! J'étais heureuse de la voir si heureuse. 

Le soir de cette remise de diplômes, il est d'usage de poursuivre la soirée par un petit apéritif avec ces élèves et leurs parents. Souvent, les 3èmes accaparent un peu leurs professeurs, partagés entre joie d'aller enfin au lycée et une certaine mélancolie à nous quitter... 

Du coin de l'œil, alors que je plaisantais avec ces grands-là qui allaient nous quitter, je voyais cette élève tourner autour de moi, sans savoir visiblement trop comment m'aborder. Cette élève-là, pourtant alors si joyeuse, hésitait à venir me parler comme elle avait déjà hésité – mais c'est le propre de la plupart des élèves – à me faire la bise lors de la remise du diplôme. Pour l'aider, je me tournai vers elle : "Alors, tu es heureuse ?". 
– Oui ! Mais surtout je voulais vous dire... Merci ! Merci de vos encouragements et puis, surtout... Merci d'avoir cru en moi !" 
Nous y voilà, elle revenait sur ce jour où elle ne croyait plus en elle... 
– Tu sais, l'important, c'est que tu croies en toi ! Tu es une fille super, une battante, continue comme ça !" 

Je n'avais pas besoin de ce merci mais j'étais heureuse qu'il vienne me dire les progrès que cette fille, seule de sa famille pour l'instant à avoir envie de faire des études dans une famille immigrée, avait réalisé dans l'estime d'elle-même. Pas d'orgueil mais comme des petits pas pour avancer dans une meilleure découverte d'elle même, avec plus de justesse : de ses richesses, bien présentes.  
C'était beau et bon, je crois. 

Et, comme chrétienne, je l'ai encore replacée sous le regard de Dieu, dans la prière, cette fois le cœur plein d'action de grâce.

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mercredi, septembre 7 2016

Le(s) prochain(s) d'une PP

 

Je ne pensais pas éprouver autant de joie à les retrouver... Oh, c'est sûr, mon coeur leur était acquis d'avance : à cette majorité de classe que j'avais eue il y a deux ans et que je retrouvais mais cette fois tous grandis et comme moi étant désormais leur prof principale, ainsi qu'à ces quelques-uns ajoutés au noyau de base que j'allais pouvoir découvrir. 

En nous retrouvant lors de l'accueil des classes, les sourires étaient sur les lèvres.

Je ne me fais pas d'illusion : ils ne sont pas meilleurs que d'autres élèves, je sais les lourds dossiers pesant sur certains d'entre eux... Même si je veux pas les y enfermer par avance. Et puis, cela vaut aussi pour moi, ils n'ont probablement pas d'illusion : je ne suis pas meilleure que d'autres profs. Mais, ça y est, l'année était lancée : un an à passer ensemble, tant en français que dans cet accompagnement tout spécifique qu'est celui du professeur principal vis-à-vis de sa classe. Un lien très spécifique, fort, éducatif, lourd parfois, mais toujours très humain. 

Déjà une semaine s'est écoulée avec les premiers cours et la joie d'avancer ensemble ne s'est pas démentie. 

L'autre fois, alors que je passais dans les rangs durant un petit travail d'écriture en autonomie, je me suis soudain rappelée la question qui avait guidé notre marche d'été sur le chemin d'Assise : "Qui est mon prochain ?". 

Une immense compassion m'a alors saisie et j'ai encore plus largement souri, provoquant aussi par contrecoup leur propre sourire...  

Les prochains qui m'étaient donnés pour cette année : y avait-il vraiment à les chercher ailleurs que dans cette classe ? :-) 

 

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Illustration tirée d'une proposition du site idees-caté.com 

lundi, septembre 5 2016

Parce que Victor Hugo a dû être prof en collège

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Dieu fait les questions pour que l'enfant réponde.

"Les deux bêtes les plus gracieuses du monde,
Le chat et la souris, se haïssent. Pourquoi ?
Explique-moi cela, Jeanne." Non sans effroi
Devant l'énormité de l'ombre et du mystère,
Jeanne se mit à rire. "Eh bien ? - Petit grand-père,
je ne sais pas. jouons." Et Jeanne repartit :
"Vois-tu, le chat c'est gros, la souris c'est petit.
- Eh bien ?" Et Jeanne alors, en se grattant la tête,
Reprit : "Si la souris était la grosse bête,
À moins que le bon Dieu là-haut ne se fâchât,
Ce serait la souris qui mangerait le chat."

V. Hugo, textes complémentaires de La Légende des siècles

lundi, août 29 2016

Fin de vacances ou pré-pré-rentrée au port

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Merveilles de l'été,
Engagements, découvertes, services et repos,
Temps qui touche à sa fin... 

L'esprit tendu déjà vers ceux que l'on va rencontrer, 
Découvrir pour certains, retrouver pour d'autres
Le coeur s'emplit de désirs de faire grandir... 

Et, pourtant, pas de vide en ce temps d'entre-deux :
Comme toujours, des détresses et des joies : 
La vie, qui, jamais, ne prend ses vacances. 

Temps d'entre-deux,
Comme une nécessité d'y ré-ancrer le point de gravité de l'année,
De prendre le temps du coeur-à-coeur devant et avec Toi,
Pour faire de chaque rencontre à venir une Visitation,
Pour faire du grand pas approchant un saut plein de confiance en Toi,
Pour épauler, pour faire apprendre, comprendre, réussir, grandir, 
Pour "être avec", vraiment
Pour apprendre chaque jour, un peu mieux, à aimer. 

Temps de "bientôt la rentrée" et comme un temps de pause au port pour polir et affermir l'ancre destinée à arrimer le navire de nos vies quels que soient les éléments à venir...
Pour être parés à embarquer dans cette nouvelle année comme dans une aventure renouvelée vers des eaux chaque fois plus profondes,
Vers les embruns vivifiants de nos vies où Il nous attend. 

vendredi, mai 6 2016

Le trouble de la vie

 

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C’était avant les vacances, juste avant les vacances. En méchante prof, j’avais mis une grosse évaluation cette heure-là… avant les vacances : horreur !  

 

Comme toujours, je prends le temps de l’accueil à l’entrée en classe : des « bonjour », des sourires, le temps pour l’un ou l’autre de me glisser discrètement un mot, l’occasion pour moi de repérer ceux qui semblent n’avoir guère le cœur à sourire… Un moment bref mais essentiel avant le cours pour prendre la température de la classe.

 

Et puis là, ce petit bonhomme là, plutôt grande gueule mais sympathique qui geint et me dit : « madame, ça va pas ! ».  J’attends que le reste de la classe soit rentré et je lui demande ce qui ne va pas : « oh, je ne me sens pas bien, c’est à cause de ce midi ! »

- Que s’est-il passé ?

- Eh bien, ma maman <imaginez le tout entrecoupé de gros sanglots>, eh bien, elle a perdu plein d’eau, du sang aussi…

- Ta maman attend un bébé ?

- Oui, on attend un bébé, elle va accoucher là, elle est partie vite avec mon père là et tout et tout !

- Bon, alors, courage, ça va aller ! Ne t’inquiète pas ! ». 

Et il repartit avec le sourire, prêt à affronter son évaluation. 

 

Et pendant le contrôle, aller le voir et lui demander à voix basse : « Et tu sais déjà si c’est un petit frère ou une petite sœur ? ».

Voir ses yeux s’illuminer pour me répondre : « une petite sœur, m’dame ! »

 

Cela semblera anodin mais, alors que j’ai si souvent des élèves troublés par le poids et les difficultés de la vie, c’était la première fois que j’en voyais un troublé par la vie elle-même, la vie naissante, la vie jaillissante… Et c’était très beau, vraiment. Savons-nous encore, nous aussi, être émus, simplement touchés et émerveillés par la vie ? 

 

mercredi, avril 13 2016

Poser un acte de foi devant un regard

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C'était la semaine dernière,
Un événement somme toute anodin en apparence...
Cet élève, cet élève-là, Ce petit gnome de 6ème comme j'aime les appeler intérieurement avec affection tant ils ont encore à grandir, à découvrir, à vivre.

Un cours comme les autres,
Des bêtises de sa part comme trop souvent,
Trop nombreuses pour pouvoir le garder jusqu'au bout :
Exclusion.

Et là, de manière inattendue, des paroles de menaces de la part de ce petit être,
Des menaces pour le futur me concernant,
De la violence qui ne se contrôlait plus,
Qui ne se calmait plus...
D'un être pourtant encore si petit :
Comme s'il pouvait vraiment faire peur !
Ce qui me fit le plus mal en réalité, ce furent ses yeux.
Les yeux, le regard, c'est toujours un endroit particulier où il me semble qu'on peut parler autrement :
On se révèle dans un regard, parfois beaucoup plus que ce que l'on peut dire.
Accrocher le regard d'un élève pour lui parler, c'est toujours un moment important tant, souvent, on est face à des yeux fuyants ou honteux :
Pourtant, pour se faire entendre, pour se comprendre, c'est essentiel.

Là, j'avais un regard en face de moi, oui, mais sur lequel je n'avais aucune prise :
Je ne lisais plus qu'une violence déchaînée, des yeux qui me fixaient comme sans me voir.
Et pourtant, je voulais voir ce coeur meilleur dont je suis persuadée que cet enfant était porteur comme tous les autres :
Je n'y arrivais pas.

Alors, j'ai dû poser un drôle d'acte de foi, cette fois non devant directement devant le Seigneur, mais devant ces yeux emplis de haine... au fond duquel Il résidait, c'était là toute la teneur de mon acte de foi :
Seigneur, donne-moi de croire en lui plus que lui-même, plus que moi-même. 

Et punir, mais en espérant ;
Et laisser cette histoire avoir les suites qu'elle doit avoir mais continuer à croire en ce garçon un peu perdu, en son bon fond auquel il semble si difficilement avoir accès, malgré tout et malgré lui.
Seigneur, viens en aide à notre peu de foi ! 

jeudi, mars 31 2016

Du père teubé à la folie d'un Dieu aimant

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Dans le cadre d'un projet transdisciplinaire en 6ème, me voici amenée à lire chaque matin pendant une semaine un ou deux texte(s), mythe(s) ou conte(s) fondateur(s) ou à claire portée philosophique, sur le thème de la fraternité et de l'altérité. 

 

Hier, ce fut, après Caïn et Abel, la parabole du Fils prodigue : "Mais Madame, il est trop teubé le père de faire la fête après tout ce que son fils lui a fait !". 

Ce matin, un conte africain dans lequel plusieurs animaux meurent à la fin pour n'avoir pas aidé un autre ou pour ne pas avoir accompli leur mission, les réactions sont unanimes : "c'est bien fait pour eux !". 

Au moins, c'était franc et clair. 

 

Sourire en mon coeur de chrétienne plongée en plein jubilé de la Miséricorde et m'interroger : 

Et si, vivre le jubilé de la Miséricorde en tout lieu, c'était aussi débuter et instiller, à notre mesure, ce retournement ou tout au moins la possibilité d'un retournement des coeurs ? Ce petit espace, même infinitésimal, où la vengeance s'efface pour ouvrir à un pardon, à une espérance vécue les bras ouverts, à une confiance toujours tendue vers l'autre ? 

 

mercredi, janvier 27 2016

Cesse ton bavardage !

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Tu sais, je râle souvent après eux de leurs bavardages incessants ;
Surtout eux, là, ces petits 6èmes qui commencent à prendre leurs aises :
Sans me lasser, je leur demande le silence et leur en rappelle l'intérêt,
Et ce matin encore lors d'un travail en petits groupes, en ajoutant : "C'est pour apprendre à vous écouter !"

Apprendre à écouter... j'en ai pris soudain moi-même pour mon matricule en pensant à ma prière :
 Tu sais bien, Seigneur, quand il y a des périodes où tout se superpose,
Comme je peine à prendre ces temps pour Toi : oh, je prie, je les prends ces moments, oui...
Mais, dans le fond, n'est-ce pas simple babillage intérieur dans tout les sens ? 

N'ai-je pas le coeur trop plein de préoccupations pour T'écouter ? 

Je sais bien que ce n'est pas le résultat qui fait la qualité d'une prière,
Mais je crois que le silence attentif, tendu d'attention aimante est nécessaire pour écouter,
Pour garder la saveur d'une rencontre unique
Et moi, où en suis-je ? 

Le silence dans la prière, il ressemble au blanc du fond d'une page qui rend possible de voir les mots ; 
Le silence dans la prière, il est semblablement ce qui permet aussi à ce qui est lumière de se détacher de ce qui est grisâtre, de ce qui est brouhaha du jour, de nos bavardages intérieurs qui, parfois, ne valent pas mieux que ceux de nos élèves ; 
Le silence dans la prière, on ne le voit pas mais on l'écoute, ou tout au moins on apprend à l'écouter, parce que Dieu s'y révèle souvent doucement,
Avec la délicatesse aimante de Celui qui préfère chacun. 

vendredi, janvier 15 2016

Ce qu'il y a d'Espérance

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Les heures de vie de classe, ces heures au contenu peu formalisé : élections de délégués, "points" à faire, préparation des conseils ou encore, comme je l'avais fait une fois, atelier philo. En 4ème, un champ s'ajoute, l'initiation à l'orientation, et nous avons mené ensemble notre première séance il y a peu avec ma classe. C'était une première pour moi. 

J'ai été agréablement surprise de voir l'intensité de l'attention de mes élèves à cette question de leur avenir : bien sûr, il y a encore une large part de rêve ou, au contraire, d'un pragmatisme un peu dommageable à leur âge ('ça gagne bien le métier x ?') mais, en tout cas, une vraie envie de penser leur avenir. Et là, en 4ème, on commence juste... 

Après un petit diaporama, leur laisser un temps pour noter sur un papier trois points : 

  • Mes envies ? 
  • Mes points forts ? 
  • Mes points faibles ? 

Ce n'était pas facile... Et je fus touchée de les entendre me dire à voix basse, tant de fois, trop de fois, apeurés : "mais moi, Madame, je n'ai pas de points forts !" ou, peut-être encore pire "je n'ai aucune qualité !". Les rassurer, tant bien que mal. Des ados, déjà, peu enclins à voir leurs qualités, mais des ados aussi venant pour beaucoup de familles dans lesquelles "c'est difficile"... Quelle confiance en eux peuvent-ils avoir ? Comment la leur donner ? 

Je restais perplexe, vraiment touchée de ce qui venait de se passer. 

Et puis il y eut alors cette élève, cette élève-là du premier rang, cette élève sans facilité mais qui se bat et qui en veut à fond, se planter en larmes, bouleversée, devant moi alors que je rangeais mes affaires : 
- Madame, vous croyez que je vais réussir ma vie ? Vraiment ?"

Me trouver désemparée, prise au dépourvu et voir ses yeux embués pleins d'attente. Il fallait que je répondre, aussi rapidement que justement. 
- Moi, je crois en toi, tu sais." Attendre un peu et compléter : "Et puis tu sais, réussir sa vie, ce n'est pas que scolairement ni professionnellement ! Il y a plein de domaines ! Sèche tes larmes, garde confiance et surtout ton habituel si beau sourire : tu es une fille pleine de qualités !".

Evidemment, c'était assez bouleversant...

Mon coeur de croyante avait envie de lui dire qu'un Autre croyait en elle, mais sur ce point, je ne puis évidemment que demeurer silencieuse.

Alors, le soir venu, j'ai confié cette élève dans le coeur-à-coeur de l'adoration et j'ai demandé au Seigneur la grâce de pouvoir toujours croire en mes élèves, même et surtout quand eux-mêmes ne croient pas en eux. 

 

mardi, janvier 12 2016

Dans ce monde où le ciel est ouvert

Plaisanterie ce soir lors de la réunion de l'équipe CdEP  à laquelle j'appartiens sur le fait qu'à un moment, j'aurais été en train de réfléchir au billet que j'allais faire sur ce qu'on disait (!!! Tss tss ;-) ). Ce n'est pas impossible du tout mais le billet suivant que j'avais prévu de poster était en l'occurrence celui-ci, un extrait d'un livre que je lis actuellement et qui porte beaucoup ma méditation ces temps-ci. 

Et pourtant, finalement, en le relisant, je me suis dit que ce n'était pas tout à fait sans lien avec ce drôle de choix d'être et d'enseigner en chrétiens dans l'enseignement public... non ? 

 

"Le Fils annonce qu'il n'est nul besoin de fuir le monde pour trouver Dieu. Le ciel n'est pas fermé. C'est dans ce monde, dans cette chair, dans ce temps, dans nos rencontres que le ciel s'invite. Cet événément infime, la vie du Christ offerte, est le gond de l'histoire du monde, le point focal de toutes nos vies, plus important que tout ce qui se passe au ciel. Ce petit réduit créateur est davantage le lieu du salut que toute galaxie d'anges. C'est à hauteur de corps, à hauteur de terre et à hauteur d'homme que tout ce qui compte advient, et Jésus nous le montre : il mange avec les siens, parle de moisson et de boisson. Il touche les corps malades, il parle et il prie. 

Le dernier mot de Dieu sur nos vies est le même que le premier : nous sommes beaux pour lui, merveilles à ses yeux, quels que soient nos travers, nos erreurs et nos fautes. Ce n'est que dans la prise de conscience de cette réalité insondable que nous trouverons la force de ressortir de nos ressentiments, de nos rétrécissements et de nos péchés. 

Plus de colère, dès lors, mais une infinie gratitude pour celui qui depuis l'origine n'attend que notre élan vers lui. Plus de honte, plus de haine. Tout est neuf pour qui s'offre au Verbe. Naître d'en haut, ce n'est pas fuir l'en bas mais y vivre renouvelés. Le ciel est ouvert, Dieu attend d'être invité dans notre conversation." 

 

Sr Anne Lécu, Marcher vers l'innocence, éd. du Cerf, 2015, p.  68-69.

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samedi, décembre 12 2015

Les chiens aboient La Caravage passe

Période chargée où le temps glisse ; Période troublée où les mots peinent parfois à trouver leur chemin... Et puis cette anecote qui va bon son chemin et qu'on a envie de narrer. Brute, sans syncrétisme ni morale.  

C'est le projet d'une année avec cette classe de 6ème : croiser l'art et la religion, en mélangeant trois matières et les quelques connaissances de trois professeurs. 

Une piste d'entrée pour commencer aujourd'hui : quelques oeuvres d'art à préparer aidés par les professeur puis à présenter par groupes. Et notamment, celle-ci : 

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Le Sacrifice d'Isaac du Caravage. 

Ce n'était pas tout à fait innocent comme choix : une scène qui se retrouve dans les trois grands monothéismes.  

Le groupe commence sa présentation : l'oeuvre, les couleurs, les lignes, la spirale du regard... et puis les personnages, la scène et un essai d'interprétation. Puis vient enfin le temps des questions des autres élèves au groupe qui présente : 

- J'ai pas compris, c'est quelle scène ? 

- Bah, c'est simple en fait, c'est la naissance de l'Aïd ! 

- C'est l'islam alors ? 

Un autre élève : "Nan, c'est chrétien Isaac !".

Avec ma collègue présente, nous intervenons en nous répondant naturellement : oui la scène est commune aux trois monothéismes. Non, ce n'est ni musulman, ni chrétien, ni juif. 

Et, surtout : "oui, ce qui est beau, c'est que vous connaissez tous l'histoire selon votre foi, avec des noms de personnages différents... et que, pourtant, vous y voyez tous la même chose !"

Un beau silence régnait à ce moment-là : un peu de savoir, beaucoup de paix. 

Et je crois que cela fait partie des moments qui font du bien...
Où je ne peux qu'imaginer Dieu, devant nos efforts balbutiants de paix, en train de nous sourire avec une infinie tendresse. 

mardi, novembre 24 2015

A fleur de peau, à fleur d’âme

 

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Il m’aura fallu du temps pour mettre par écrit ce que fut cette semaine post-attentats : je crois que j’ai rarement vécu une semaine aussi dense sur le plan professionnel et il était difficile de mettre des mots dessus. Ca l’est toujours.

 

Soyons clairs : l’immense majorité des élèves était autant sous le choc que leurs professeurs.

J’ai été touchée par les mots, les dessins des 6èmes, qui reflétaient beaucoup de peur ou de tristesse et, parfois, une grandiose espérance lumineuse en la vie ;

J’ai été touchée par le mot venu du cœur d’un collègue qui s’est répandu par la suite dans plusieurs classes : « les terroristes, c’est rien que des conn**ds » ;

J’ai été touchée par la douleur si forte de certains de mes collègues, abattus ;

J’ai été touchée par l’immense volonté de « comprendre » des 4èmes dont je suis prof principale, par cette très belle discussion que j’ai eue avec eux sur la différence entre religion et extrémisme : tous, nous en sommes sortis grandis.

Et pourtant, quand est arrivé vendredi soir, fatiguée à un point comme jamais je ne le suis, ce sont les quelques réactions extrêmement minoritaires inadmissibles qui me restaient en tête comme une ritournelle, comme des violences personnelles presque, ce qu’elles n’étaient pas.

 

Je n’ai pas envie de les écrire ici : elles donneraient une image du « jeune de banlieue » qui n’est pas juste parce qu’il s’agit de seulement quelques-uns, beaucoup dans la provoc’. Quelques-uns qu’on aimerait tant aider à mûrir, à grandir…

Je n’ai pas envie de m’y attarder quoique ce cas m’ait hantée.

 

Et pourtant, Dieu que cette semaine fut difficile…

La salle des profs était dans un  abattement certain, les élèves semblaient eux-mêmes spécialement « durs » : pourquoi ?

Je suis restée avec cette question.

 

Et soudain, j’ai repensé aux premières heures de lundi dernier,

Ces heures où j’ai pris en binôme une classe inconnue avec une collègue : elle n’était pas bien à cause de la situation et, à un moment, elle s’est éloignée.

Un de ses élèves m’a dit : « Elle est partie pour pleurer ?

- Je n’en sais rien, cela ne te regarde pas.

- Mais les professeurs, ça pleure ?

- Oui, les professeurs, comme tous les adultes même, ça pleure. Je crois que nous, vos professeurs, on a presque tous pleuré ce week-end ».

Pendant quelques instants, il y eut un silence étonné dans la classe.

Cette phrase était importante à leurs yeux.

 

Ce fut une semaine difficile, oui, une semaine difficile parce que nous étions tous plus qu’à fleur de peau : nous étions tous à fleur d’âme puisque ce que les terroristes avaient touché, c’était à la vie.

A fleur de peau, on réagit brusquement ;

A fleur d’âme, on réagit avec tout notre être : à la violence, à toutes les sollicitations… et l’on dit beaucoup de soi-même aussi : professeurs, aussi bien qu’élèves ;

Des êtres dans toute leur entièreté, ça fait peu dans la dentelle : c’est dense, mastoc et, dans le même temps, assez beau.

C’était peut-être surtout une semaine très véridique, une semaine exigeante pour chacun, pleine d’être.

Puisse cette semaine à la saveur si étrange amener un « supplément d’âme » ou un « supplément d’être » – selon votre religion – à chacun.

Merci à vous qui avez prié pour les professeurs. 

 

dimanche, novembre 15 2015

Demain dès l'aube j'enseignerai

 

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Demain matin, dès l’aube, il faudra les accueillir ;

Demain matin, il faudra les écouter, les accompagner ; 

Demain matin, il faudra leur dire… quoi ? Comment ?

Quels sont les mots justes quand il n’y a que barbarie indicible ?

 

Je rumine tout cela dans ma tête depuis les événements de vendredi soir ;

Et je prie l’Esprit Saint de me donner mots et attitudes justes.

D’ailleurs, aujourd’hui, je ne suis sortie que pour prier : la messe puis, bien plus tard, les vêpres.

 

En chemin, j’ai respiré à fond l’air qui emplissait mes poumons et j’ai cru lire chez les passants le désir de faire de même ;

Au square pour les enfants, il y avait une affluence bien plus grande que d’habitude ;

Dans les rues, pour un dimanche après-midi, que de couples de tous âges tendrement enlacés faisant une balade ensemble ;

Dans la « coulée verte », que de personnes en train de se parler tout en se promenant !

Il y avait quelque chose d’une douceur printanière, d’un bain de vie, d’un bain d’humanité :

Comme des asphyxiés qui peuvent d’un coup respirer à nouveau l’air libre avec une forme d’ivresse folle.

J’ai souri : c’était juste et c’était beau.

 

En chemin, j’ai aussi vu des bougies sur les fenêtres ;

Des symboles de paix scotchés sur d’autres ;

Ou encore des drapeaux français qui dépassaient.

Peu importe le symbole qui était choisi, cela disait l’union et la compassion dans l’horreur, au-delà de toute conviction ou croyance.

J’ai encore souri car là aussi, c’était juste et c’était beau.

 

Demain, nous, enseignants, serons en classe avec eux, ces jeunes à l’esprit encore en formation ;

Demain, nous parlerons de ce qui s’est passé, sans vraiment savoir à l’avance où iront les échanges : il y aura de l’émotion, des coups de gueule, peut-être des pleurs ou des difficultés, comment savoir ?

Demain, je chercherai à être juste et pédagogue, à expliquer et à consoler, comme je peux, au mieux ; 

Mais demain, je tâcherai aussi de repenser à ce que j’ai vu dans les rues aujourd’hui pour leur redire combien cela vaut le coup de grandir, d’apprendre, et de vivre. 

 

Demain comme hier, nous continuerons de prier pour toutes les victimes, leurs proches et leurs bourreaux de Beyrouth comme de Paris : c’est l’essentiel ;

Mais n’hésitez pas, demain, s'il vous plaît, à ajouter une pichenette de prière pour les enseignants : nous en avons et en aurons besoin.

 

lundi, novembre 9 2015

Diffracter plutôt que filtrer

 

http://www.lire-les-notes.com/goodies/prisme-the-dark-side-of-the-moon.jpg

 

- Nan mais madame, en quoi l’altruisme, ce serait mieux que l’égoïsme ? Moi j’pense à moi d’abord ! »

 

Et bim. Voilà comment, d’un simple cours sur la figure du héros dans le roman d’aventures et ses qualités morales, tu passes d’un coup à une question à la limite de l’existentiel.

 

Altruisme donc. Un mot dont je venais de leur expliquer le sens en ajoutant combien c’était beau que le héros risque sa peau pour les autres.

 

Des réactions diverses :

- M’dame dans la vraie vie, c’est chacun pour soi, ça se voit qu’c’est inventé !

- J’vois pas en quoi c’est mieux, ça apporte rien ! »

Et puis, cette question susmentionnée.

 

Et c’est là que tu te rends compte que tu as un filtre chrétien devant tes yeux… Que l’altruisme, que l’amour de l’autre, la philanthropie, c’est une évidence pour toi, mais une évidence que tu as fondée avant tout sur ta foi.

Oh, je sais bien qu’il est des êtres formidables qui font preuve d’un superbe altruisme sans avoir la foi et je pourrais citer de nombreux collègues – coucou à vous si vous me lisez les copains ! – mais il n’empêche : j’ai ce « filtre » chrétien car pour moi, l'altruisme, c’est intimement lié à ma foi…

« Il n’est pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » : on pourrait se bercer de cette phrase alors qu’elle est parole exigeante, nous appelant à viser toujours plus haut.

 

Alors se retrouver en quelques secondes à devoir improviser une explication…

Lancer un grand appel intérieur à l’Esprit Saint, improviser, hésiter, chercher ses mots et, surtout, à contrer le poids de l’évidence par quelque chose d’accessible à qui ne partage pas les mêmes valeurs que les miennes ;

Finir par bafouiller un discours sur le fait qu’on ne pouvait pas être heureux tout seul,

Que la relation nous rendait heureux,

Et même comme exemple que, s’ils vivaient une grande joie, ils n’avaient pas de plus grande hâte qu’en parler à leurs amis !

 

Ce n’était pas terrible et j’y reviendrai à l’occasion avec eux. Mais ce fut pour moi une expérience marquante, pas tant celle d’un égoïsme affiché comme bon, mais celle d’un devoir de dépasser les racines de mon être pour transposer leur fruit à un être ne partageant pas les mêmes que moi. Pas simple.

 

En rentrant, j’ai prié.

J’ai demandé au Seigneur la grâce qu’Il transforme mon filtre chrétien en prisme chrétien :

Pour diffracter Sa lumière en autant de coloris qu’Il le jugera bon, pour La transmettre à chacun dans les fréquences de réception qui sont les siennes,

En autant de reflets de Son unique Lumière.

 

samedi, octobre 17 2015

Vous êtes le regard du Christ

 
Dans mes merdouilles, 
Dans mes péchés
Dans ces moments-là dont je ne suis vraiment pas fière, 
Et même, quand je viens T'en demander pardon : 
Il est un regard qui m'espère. 
 
Et eux ; 
Et leurs cris, leurs bêtises qui sonnent si fréquemment comme autant de "moi, moi, regarde-moi ; fais attention à moi" ; 
Ces mains levées, ces appels, qui réclament toute notre attention et qu'on ne peut leur donner pleine, autant qu'il faudrait ; 
Ces appels à l'aide dissimulés sous des fanfaronnades lourdes d'ado : 
Parce que je le crois, 
Il est un regard qui les espère. 
 
Ce regard qui voit le meilleur, même enfoui dans le plus intime de leur cœur, 
Ce regard sans préjugé,
Ce regard sans surchauffe, sans ras-le-bol même après une journée finie exténuée, 
Ce regard qui les attend et qui les voit plus grands, 
Ce regard qui pousse non à l'enfermement mais à la marche dynamique vers un plus. 
Un regard de confiance, 
Un regard d'espérance : le Sien. 
 
Appel à une conversion de regards, 
À devenir Son regard pour eux, 
Apprendre moins à espérer de nos élèves telle attitude, 
Mais apprendre, là où ils en sont, à espérer nos élèves ; 
Regard d'espérance pour un appel à croître. 

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